Près de deux milles morts à Gaza, en majorité des civils et beaucoup d’enfants, des écoles et des hôpitaux bombardés, la ville en ruine. Plus d’une soixantaine de morts dans les rangs de l’armée israélienne, le chiffre le plus élevé depuis la guerre du Liban… Le bilan de l’opération « bordure protectrice » est lourd et le résultat douteux. Le risque d’attentat n’a pas diminué comme le montre l’attaque à la pelleteuse à Jérusalem, lundi après-midi.
Le gouvernement de Benjamin Netanyahou affirme que ses buts de guerre ont été atteints. Tsahal a détruit plus d’une trentaine de tunnels creusés par le Hamas pour acheminer des hommes vers Israël afin d’y commettre des attentats. Des sites de lanceurs de missiles, qui visaient les colonies ou les villes israéliennes, ont été démantelés. Mais il en reste encore. Les observateurs, en Israël même, se demandent si le Premier ministre prépare déjà les prochaines élections en se présentant en vainqueur. Grâce son intransigeance, il pense marquer des points par rapport à ses alliés d’extrême-droite.
Pourtant rien n’est réglé. Le Hamas a été affaibli, pas éradiqué. Si le but d’Israël est de séparer la population palestinienne, notamment à Gaza, de l’organisation extrémiste, l’opération militaire ne peut être que contre-productive. L’Autorité palestinienne est plus marginalisée que jamais et sa légitimité comme participante aux négociations de paix minée par ceux-là mêmes qui devraient être ses interlocuteurs. La possibilité des deux Etats vivant côte à côte s’éloigne alors qu’il n’y a pas, pour le moment, de solution de rechange.
Gaza est un champ de ruines, symbole de la faillite de la politique. Les appels de l’ONU, de l’Europe et des Etats-Unis sont vains. La droite israélienne sait que les pressions américaines ne peuvent pas dépasser un certain seuil où la sécurité d’Israël serait en danger. La population fait corps avec elle aussi longtemps au moins que durent les opérations militaires. Les voix qui appellent à sortir de l’impasse par une initiative politique sont peu nombreuses et inaudibles. Une forme de fatalisme s’est installée dans la communauté internationale. Tout se passe comme si on avait pris l’habitude d’un conflit qui s’étale depuis près de six décennies, avec des phases de haute intensité et des phases d’accalmie qui donnent l’illusion de la paix.
Une amélioration des conditions de vie du million et demi de Gazaouis grâce à une levée du blocus, qui n’a pas cessé depuis l’évacuation de la bande de Gaza par l’armée israélienne, serait de toute évidence la bienvenue. Malgré une présence militaire sporadique et des incidents fréquents, le niveau de vie s’est élevé en Cisjordanie et les prémices d’un développement économique sont visibles. Ce ne serait toutefois qu’un palliatif, souhaitable certes, insuffisant en tous cas pour résoudre le problème de fond, qui est un problème d’identité, de reconnaissance et d’autodétermination.
Sans vision politique de la part des responsables israéliens, pas de paix. Pas de paix sans des décisions courageuses qui exigent de renoncer à un grignotage permanent des territoires palestiniens par la colonisation, y compris à Jérusalem-Est. Sans solution politique, la prochaine opération militaire israélienne, qu’on baptisera de nom aussi évocateur que « Plomb fondu » ou « Bordure protectrice », est déjà programmée.