Une analyse "ombres et lumières" de cette réflexion pose la question de savoir si le Brésil est "l’enfant gâté" de la région plutôt que le "bon élève". Dans l’ensemble, la décennie 2002-2012 a été favorable. Est-ce que cela peut continuer ? Malgré le progrès économique, l’Amérique latine, avec l’Afrique, a l’une des pires distributions de richesses. Il y a aussi des bonnes nouvelles au Chili, au Pérou et en Colombie. Les indicateurs sociaux, économiques et la démocratie progressent. Deux attitudes sont possibles. La première, peut-être facile et superficielle, serait de dire "on est arrivé, on est maintenant avec les grands, les BRICs, etc."
Une nouvelle occasion ratée ?
Mais ce n’est pas la première fois que pour diverses raisons l’Amérique latine pourrait rater le coche. Il y a eu au 20ème siècle au moins deux occasions perdues. En ira-t-il autrement cette fois-ci ? Le Brésil est au centre du jeu. En 2040 cette région pourrait être "développée". Le critère économique du "développement" est un revenu annuel moyen par habitant de 28.000$. Aujourd’hui, la plupart de ces pays sont à la moitié de ce chiffre.
Le contexte économique mondial évolue d’un systéme bipolaire (Amérique du Nord-Europe) vers une configuration tripolaire (Amérique du Nord-Europe-Chine/Japon). Les deux premiers représentent chacun environ 25% de l’économie mondiale. Chine/Japon est entre 25 & 30%. Dans le groupe "next 11", au-delà des BRICs, il y a l’Afrique du Sud, la Turquie, le Mexique, l’Indonésie. Le Brésil représente 3% de l’économie mondiale. Le Brésil avec le "Cône Sud" représente 4%. L’Amérique du Sud en tout représente 5% (même niveau que l’Inde). Les classes moyennes sont en augmentation surtout en Asie et en Amérique Latine. Mais la part de l’Amérique Latine dans le commerce international ne progresse pas. Le progrès économique est lié aussi à la capacité de créer des sociétés multinationales. De même il dépend de l’innovation, des niveaux d’éducation, des capacités à maitriser les technologies de l’information. ("Supply chain management, Exporting processed food, not only commodities.") Un facteur important du développement est la capacité à exporter. Le Brésil a fait des progrès au niveau de l’éducation primaire, mais il y a encore des manques de main d’œuvre qualifiée, d’ingénieurs, et autres techniciens. Dilma Roussef fait des efforts de "débureaucratisation", la bureaucratie et la corruption étant un fléau ancien du pays et un frein à la croissance pour les moyennes entreprises.
En résumé pour réussir dans le contexte économique mondial il faut plus d’efforts pour développer l’agrobusiness, l’industrie et les services. Il faut faciliter le développement des entreprises multinationales. Il faut encourager l’innovation et l’éducation, et améliorer la distribution des revenus.
Les impasses du Mercosur
Le Mercosur a été fondé en 1991 peu après la chute du mur de Berlin. Il fallait enterrer la hache de guerre de la rivalité ancienne entre le Brésil et l’Argentine. Pour plus de croissance économique il fallait ouvrir les marchés et réduire le protectionnisme. Jusqu’en 1999 le commerce international et les investissements étaient florissants. Avec divers gouvernements protectionnistes, notamment en Argentine, tous ces progrès sont en panne depuis plus de dix ans. Mercosur devient une forteresse politique pour exclure l’Amérique du Nord, a fortiori si le Venezuela doit en faire partie. Le Mercosur n’est pas le marché unique, sur le modèle de l’Europe, que les fondateurs avaient en tête. Les plaintes se multiplient à cause des barrières douanières, tarifaires ou réglementaires.
A contrario,les pays qui connaissent les meilleures performances dans la région sont les pays du Pacifique (Chile, Pérou, Colombie) qui pratiquent l’ouverture des marchés et gardent leur distance avec les nouvelles tendances politiques du Mercosur.