La prise de Debaltseve par les séparatistes prorusses après plusieurs jours de combats est significative de la manière dont Moscou entend l’accord de cessez-le-feu trouvé à Minsk, le 12 février, entre Vladimir Poutine, François Hollande, Angela Merkel et Petro Porochenko. La Russie et ses affidés locaux n’ont l’intention de le respecter qu’aussi longtemps qu’ils pensent en tirer profit. Dans le cas contraire, ils n’ont aucun scrupule à le violer ouvertement.
Selon l’accord dit « Minsk 2 » – « Minsk 1 » de septembre 2014 n’est jamais entré en vigueur –, les armes auraient dû se taire dimanche 15 février à 0 heure et les deux parties auraient dû commencer à retirer les armes lourdes des deux côtés des lignes de front qui passent justement par Debaltseve. Si le cessez-le-feu a été à peu près respecté dans l’ensemble du Donbass, malgré quelques incidents, les hostilités n’ont pas cessé autour de Debaltseve, où une garnison de plusieurs milliers de soldats ukrainiens était encerclée. Cette ville a une importance stratégique. C’est un nœud de communications ferroviaire et routier qui permet la liaison entre les deux républiques autoproclamées de Donetsk au sud et de Louhansk au nord.
Debaltseve a fait l’objet d’une épreuve de force entre le président russe et la chancelière allemande lors des négociations de Minsk. Le président russe posait comme condition d’un accord sur le cessez-le-feu la reddition de la garnison de Debaltseve. Angela Merkel a menacé de quitter la réunion. Debaltseve a ensuite été laissé de côté. Pour Vladimir Poutine, peu importait finalement que le sujet soit de nouveau débattu, puisqu’il a l’habitude de mettre ses interlocuteurs devant le fait accompli. C’est encore ainsi qu’il a agi avec cette offensive sur Debaltseve.
Maintenant que les séparatistes ont atteint leur objectif, le cessez-le-feu et le règlement politique ont-ils plus de chance de succès ? Vladimir Poutine se contentera-t-il de cette nouvelle défaite des autorités démocratiques de Kiev ou poussera-t-il son avantage ? Lui seul a la réponse à ces questions. Les Européens, notamment les Français et les Allemands qui sont à l’origine des pourparlers de Minsk, dénoncent la violation du cessez-le-feu mais ne veulent pas encore considérer que « Minsk 2 » est mort. Ce serait admettre que leur initiative est un échec. Difficile, quand on n’a à sa disposition que des sanctions économiques qui font mal à l’économie russe mais ne font pas plier Poutine.