Le premier gouvernement du quinquennat se targuait de privilégier l’ouverture, de promouvoir la diversité et de respecter la parité. Le nouveau gouvernement se distingue par une vraie fausse ouverture, par une diversité écornée et par une absence de parité. L’arrivée rue de Valois d’un homme de culture, Frédéric Mitterrand, dont le patronyme évoque la gauche mais dont la pensée est plutôt de droite - ce qui n’enlève rien à sa réelle compétence - relève d’une vraie fausse ouverture.
Le propos est de créer l’illusion et de donner à croire à l’opinion que l’ouverture est toujours à l’ordre du jour. Il en va de même de la nomination comme ministre de l’espace rural du trésorier du Modem, Michel Mercier qui a depuis longtemps un grand pied à droite et en conserve un petit dans l’opposition. L’objectif élyséen est évidement de déstabiliser un peu plus un François Bayrou défait lors des dernières élections européennes.
La diversité ne semble plus un souci majeur. L’entrée de Nora Bera au gouvernement avec le titre de secrétaire d’Etat aux aînés ne compense pas le départ de Rachida Dati qui quitte un grand ministère régalien, celui de la Justice. Rama Yade, de son côté, abandonne la très symbolique défense des droits de l’Homme pour un maigre secrétariat aux sports. Ce qui ne ressemble guère à une promotion.
Enfin la parité n’est plus qu’un souvenir : le nouveau gouvernement comporte 13 femmes pour 25 hommes.
Ce qui caractérise bien plutôt le gouvernement remanié par Nicolas Sarkozy au lendemain des élections européennes est - Monsieur de Lapalisse ne dirait pas autrement - son caractère profondément sarkozien. Il est sarkozien par les hommes et les femmes qui le composent, sarkozien par le pragmatisme qui inspire son organisation, sarkozien par les objectifs prioritaires qu’il s’assigne.
Tous les poids lourds de la Sarkozie s’y retrouvent à des postes importants. C’est ainsi que l’ami par excellence du chef de l’Etat, Brice Hortefeux, se voit confier le ministère clef de l’Intérieur. Quant à ceux qui n’étaient pas encore dans le gouvernement, ils y font leur entrée. C’est le cas de Christian Estrosi ou de Pierre Lelouche.
Ce gouvernement est réorganisé en sorte d’être efficace et à la main du président. Si Xavier Darcos est muté au ministère du Travail c’est à la fois parce qu’il était usé à l’Education et parce que son sens du dialogue peut servir dans les négociations que devra avoir le ministre des Affaires sociales avec les organisations syndicales. Si Bruno Le Maire se retrouve à l’Agriculture c’est parce que ce bon connaisseur de l’Europe et de l’Allemagne va devoir discuter de la PAC avec nos voisins. En revanche, l’efficacité commandait d’écarter les bras cassés et les erreurs de casting. Nicolas Sarkozy l’a fait sans état d’âme.
Nicolas Sarkozy a bien reçu le message envoyé par les électeurs à l’occasion du scrutin des européen. L’écologie demeure une priorité. Le ministère de Jean-Louis Borloo est confirmé, conforté et renforcé. Brice Hortefeux sera le bras armé de Nicolas Sarkosy sur le dossier de la sécurité, thème phare du quinquennat. Il lui reviendra aussi de suivre la réforme des collectivités locales dont le président souhaite qu’il ouvre la voie à une véritable révolution dans l’organisation des territoires. Pour traverser la crise financière et économique, le tandem Lagarde-Woerth demeure inchangé. On ne change pas un moteur durant l’épreuve !
François Fillon demeure le Premier ministre théorique de cette nouvelle équipe. Chacun interprètera cette longévité à sa manière. Certains admireront l’esprit d’abnégation de François Fillon. D’autres critiqueront sa capacité à endurer pour durer. Ce qui est certain, en tous les cas, c’est que François Fillon n’a joué dans ce remaniement qu’un rôle d’appariteur. Il lui a été demandé d’accueillir les entrants et d’annoncer aux sortants leurs sorties. Trois jours avant ce remaniement, il ne savait rigoureusement rien des intentions du chef de l’Etat.
Il ne lui revient même pas d’aller devant le parlement pour y défendre sa politique et solliciter la confiance de l’Assemblée. Le président a estimé que sa prestation devant le congrès à Versailles rendait inutile une telle démarche. Premier ministre d’un gouvernement choisi et nommé par le seul chef de l’Etat, François Fillon sera tout juste bon éventuellement à subir une motion de censure défendue par l’opposition mais qui n’a aucune chance d’aboutir.