A l’image de ses premiers jours de président, Emmanuel Macron a réussi un sans faute lors de sa visite à Berlin. Il a été chaleureusement accueilli par Angela Merkel et, fait rare, par une petite foule de militants pro-européens massée devant la chancellerie. Seul Barack Obama avait eu droit à une telle réception.
Avec le poète Hermann Hesse, la chancelière a vanté « le charme » des commencements, tout en avertissant que la réalité serait juge. C’est bien en effet sur les résultats de cette coopération franco-allemande relancée par une volonté commune qu’il faudra juger les bienfaits du nouveau « couple » Merkel-Macron, déjà baptisé M&M par le quotidien de centre-gauche Süddeutsche Zeitung.
Chacun veut faire preuve de bonne volonté. Le nouveau président français semble déterminé à mener à bien les réformes que ses prédécesseurs ont promises sans jamais les réaliser. Non pour faire plaisir à Bruxelles ou à Berlin, a-t-il pris soin de préciser, mais parce que ces réformes sont indispensables au rétablissement de la situation française. Il compte moins sur l’aide de l’Allemagne que sur sa disponibilité à prendre, en commun, des initiatives pour relancer l’Europe. Sans s’engager formellement, Angela Merkel n’y est pas opposée. Elle a même accepté le principe d’une révision des traités européens – « si cela à un sens » — qu’elle refusait jusqu’alors.
Les mesures que propose Emmanuel Macron pour renforcer la zone euro – ministre des finances commun, contrôle parlementaire, budget – sont aussi discutées à Berlin. Cela ne veut pas dire qu’il y ait un accord. Français et Allemands ne mettent pas les mêmes choses derrière les mêmes mots. Pour Paris, par exemple, le ministre des finances de la zone euro devrait gérer les investissements prévus dans le budget commun. Pour la chancelière et surtout pour son ministre des finances, Wolfgang Schäuble, la tâche de ce nouveau responsable serait plutôt de veiller au respect des règles budgétaires par chaque membre de la zone euro.
Au moins s’est-on entendu pour en parler sérieusement. Rien ne pourra être décidé avant les élections au Bundestag du 24 septembre. Mais les quatre mois qui séparent les élections françaises du scrutin allemand ne seront pas du temps perdu. Ils peuvent être mis à profit pour préparer les dossiers, écarter les malentendus, préparer une relance pour la fin de l’année. Et avant tout pour permettre à Emmanuel Macron de montrer le sérieux de ses intentions.
Angela Merkel, et elle n’est pas la seule en Allemagne, ne croit que ce qu’elle voit. Le nouveau président français, qui bénéficie d’un a priori favorable, ne la convaincra que par ses actes. Il n’en sera que mieux placé ensuite pour demander aux Allemands de faire leur part du chemin. De ne pas regarder l’Europe seulement avec des yeux de comptables. D’embrasser la dimension politique menacée par les populismes de tous ordres, qui finiraient par avoir le dernier mot si les égoïsmes nationaux l’emportaient sur la solidarité. Si l’Union européenne se montrait incapable d’être fidèle à sa promesse de paix et de prospérité.