Maduro l’autocrate

Une grande partie de la communauté internationale a refusé de reconnaître la réélection de Nicolas Maduro à la présidence du Venezuela, dont elle juge les conditions contraires aux normes internationales qui définissent un processus électoral « transparent et démocratique ». La plupart des Etats d’Amérique latine se sont associés à cette condamnation. Ils ont rappelé leurs ambassadeurs à Caracas et contesté par ce geste la légitimité du scrutin qui a confié un nouveau mandat au successeur d’Hugo Chavez, au pouvoir depuis la mort de l’ancien président en 2013. Comme l’a expliqué le président du Chili, Sebastian Pinera, le vote du dimanche 20 mai ne respecte pas les critères d’une élection démocratique. Il n’exprime pas la « volonté libre et souveraine » du peuple vénézuélien. Les Etats-Unis et l’Union européenne ont également rejeté ce résultat.

Nicolas Maduro a été réélu avec 67,7 % des suffrages. Ses deux concurrents, Henri Falcon, ancien gouverneur de l’Etat de Lara, chaviste dissident passé à l’opposition, et Javier Bertucci, pasteur évangélique, ont obtenu respectivement 21% et 10% des voix. Mais ce qui caractérise surtout le vote des Vénézuéliens, au-delà de la victoire de Nicolas Maduro, c’est la faible participation au scrutin. Avec un taux d’abstention de 53,9%, les électeurs ont manifesté leur désintérêt pour une élection qu’ils savaient jouée d’avance. Loin de plébisciter le président sortant et de lui offrir le triomphe « historique » que celui-ci s’est empressé de revendiquer, ils ont traîné les pieds en refusant, pour une majorité d’entre eux, de céder aux pressions du pouvoir. Dans le même temps, ils ont appliqué les consignes de boycottage lancées par l’opposition (à l’exception d’Henri Falcon), dont les principaux chefs avaient été empêchés de concourir.

L’interdiction faite aux dirigeants de l’opposition d’être candidats à l’élection n’est que l’une des nombreuses atteintes à l’Etat de droit dont Nicolas Maduro s’est rendu coupable depuis sa prise du pouvoir. Il a refusé de respecter les résultats des élections législatives de décembre 2015, gagnées par l’opposition, et choisi de contourner le nouveau Parlement en faisant élire en 2017, dans des conditions controversées, une Assemblée constituante entièrement contrôlée par les chavistes. Ses adversaires politiques ont été jetés en prison ou contraints à l’exil. La démocratie a laissé place à une autocratie au bénéfice de Nicolas Maduro, lequel n’a cessé d’accroître son emprise face à une opposition incapable de s’unir pour combattre efficacement la nouvelle dictature. L’élection présidentielle du 30 mai, qualifiée par certains de « farce », a marqué une nouvelle étape dans la violation continue de l’Etat de droit.

Le pays est en ruine. Les pénuries croissantes (de nourriture, de médicaments, de produits de première nécessité) contraignent à l’exode des centaines de milliers de Vénézuéliens, qui se réfugient en Colombie ou au Brésil, les deux Etats les plus proches. Nicolas Maduro s’est révélé incapable d’apporter des solutions à une crise qui ne fait que s’aggraver. Jadis prospère, le Venezuela est au bord de l’effondrement. La population a perdu ses dernières illusions. En 2013, le taux de participation avait été de 79,68% et Nicolas Maduro ne l’avait emporté que d’extrême justesse (50,6%) sur le candidat de l’opposition, Henrique Capriles. Aujourd’hui l’opposition n’est plus audible, en partie par sa faute, en partie du fait de la répression qu’elle a subie. Quant au président, il se maintient au pouvoir par la fraude et la mise à l’écart de ses concurrents.

Il n’y a guère en France que Jean-Luc Mélenchon et ses amis de la France insoumise pour prendre la défense de Nicolas Maduro et crier à la « désinformation » dès qu’est dénoncée la dictature de l’ancien protégé d’Hugo Chavez. Jean-Luc Mélenchon n’en démord pas, lui qui a naguère revendiqué l’action du régime vénézuélien comme « une source d’inspiration ». Comme autrefois Cuba, la « révolution bolivarienne » proclamée par Hugo Chavez continue ainsi d’enflammer une (petite) partie de la gauche française. Il semble bien qu’elle ne mobilise plus le peuple vénézuélien.