Largement battue aux élections de 2010, l’opposition hongroise se prend à rêver de revanche. Face au pouvoir autoritaire de Viktor Orban, accusé de porter atteinte à l’Etat de droit et mis au ban de l’Union européenne pour ses pratiques jugées contraires aux principes démocratiques, se dresse une nouvelle force politique, incarnée par l’ancien premier ministre Gordon Bajnai et déterminée à prendre la relève aux élections de 2014.
Ce banquier de 44 ans, qui fut ministre sous l’autorité du socialiste Ferenc Gyurcsany avant de diriger lui-même le gouvernement pendant un an, de 2009 à 2010, vient de lancer un appel au rassemblement, par delà le clivage droite-gauche, pour mettre fin au système Orban, nommé par ses adversaires Orbanistan. « Ils ont brisé méthodiquement, vertèbre par vertèbre, l’échine de la démocratie », affirme-t-il.
Gordon Bajnai veut réunir les déçus de la vieille gauche et ceux de la nouvelle droite dans une coalition baptisée Ensemble 2014, un peu comme Romano Prodi avait su naguère, en Italie, associer les démocrates-chrétiens et les sociaux-démocrates au sein de l’Olivier ou comme aujourd’hui, toujours en Italie, le « technocrate » Mario Monti est parvenu à regrouper autour de lui ceux qui ne voulaient plus du flamboyant Silvio Berlusconi.
Comme celle du premier ministre italien, l’image de Gordon Bajnai est celle d’un économiste extérieur aux partis politiques. Elle est aussi celle d’un homme de rigueur : à la tête du gouvernement il a pris des mesures sévères pour réduire les dépenses publiques après les errements de son prédécesseur, Ferenc Gyurcsany.
Il faut croire que les Hongrois ne lui en veulent pas puisque les premiers sondages placent sa nouvelle formation devant le Parti socialiste et l’opposition unie devant le Fidesz de Viktor Orban. Le numéro un du Parti socialiste, Attila Mesterhazy, n’a pas exclu d’apporter son soutien, le moment venu, à Gordon Bajnai. On n’en est pas là, deux ans avant l’échéance. Mais il est vrai que le mécontentement grandit en Hongrie face aux conséquences de la crise économique.
La confiance dans l’avenir est au plus bas et la crainte du chômage au plus haut. Une récente étude de l’OCDE affirme que le ralentissement de l’économie mondiale et les turbulences sur les marchés des capitaux « ont précipité une économie déjà fragile et lourdement endettée vers la récession ». L’opinion s’en inquiète. Viktor Orban vient de perdre deux élections locales. Le climat favorise les ambitions de Gordon Bajnai.
Certains, à gauche, ne veulent pas d’un « homme providentiel ». Ils rejettent celui qui leur apparaît comme l’homme de l’Europe et des marchés. A droite, Viktor Orban met en garde contre un retour en arrière. Le combat politique s’annonce animé dans les mois à venir.