LA VERTU ET LA PAIX

La visite en Syrie de quatre parlementaires français a relancé le débat sur la politique de François Hollande vis-à-vis du régime de Damas. Francis Gutmann, ambassadeur de France, soutient que « l’intransigeance » de Paris envers Bachar el-Assad est peut-être « vertueuse » ; il n’est pas sûr qu’elle serve la paix.

Printemps arabe. Une insurrection se lève en Syrie. Elle est contre Bachar el-Assad. Celui-ci est un dictateur, nous ne pouvons que la soutenir. Nous le ferons donc, mais sans nous interroger sur ses chances de l’emporter.

Moscou de son côté défend Bachar el-Assad. Pour la paix, il aurait fallu sans doute chercher à nous entendre avec lui pour conduire les Syriens à un compromis. La chose n’était pas sûre, mais elle aurait mérité d’être tentée. Si la tentative avait réussi, elle aurait sans doute évité des milliers de morts résultant de la poursuite de la guerre.

Le temps passe. Les insurgés se divisent de plus en plus. Les islamistes en profitent pour détourner l’insurrection à leur profit. On en vient ainsi à Daesh, occupant une partie de la Syrie en même temps qu’une partie de l’Irak. Ce nouvel état de choses renforce el-Assad. D’aucuns en Europe et aux Etats-Unis, estimant que son concours militaire serait nécessaire pour venir à bout de Daesh, commencent à se demander s’il ne faudrait pas, quoi qu’il en coûtât, reprendre contact avec Damas.

La France s’y refuse catégoriquement. Elle continue de regretter une intervention militaire qui aurait pu pourtant être à l’origine d’un désordre général dans la région. Mais surtout, elle s’était abstenue de rechercher avec Moscou un compromis imposé à Bachar el-Assad, ce dictateur. Ce n’est pas pour traiter aujourd’hui avec Bachar el-Assad, ce criminel.

La vertu est pour elle. Quant est-il du réalisme ? Que signifie de combattre Daesh en se limitant au seul territoire irakien ?

Plutôt que de tenter d’infléchir la position du gouvernement, quatre parlementaires ont cru, de leur propre initiative, pouvoir prendre contact avec Damas. Une diplomatie parallèle et personnelle est souvent source de confusion.

Reste la seule vraie question. Pour autant que le concours de Bachar el-Assad, comme on peut le croire, soit vraiment nécessaire pour battre Daesh, l’intransigeance française est vertueuse, mais elle n’est sans doute pas la meilleure façon de servir la paix.